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Nanowrimo

NB : pour ceux qui ne connaîtraient pas, le Nanowrimo signifie « National Novel Writing Month » ; c’est un projet d’écriture créative dans lequel chaque participant tente d’écrire un roman de 50 000 mots – soit environ 175 pages – en un seul mois, et ça a lieu chaque année en novembre.

Etrange comme souvent la littérature fait écho à la vie (ou est-ce l’inverse ?) La preuve, dans ce post… 

Je dois l’avouer, le défi du nanowrimo est de taille, et écrire quotidiennement n’est pas une discipline facile. Nous sommes à la moitié du mois, et sur les 50 000 mots prévus fin novembre, je n’en ai écrit « que » 11838. C’est mieux que zéro, mais si je veux remplir le contrat que je me suis fixé, il va falloir que je carbure un peu plus… Cependant, je ne m’inquiète pas, car je constate chaque jour que l’acte d’écrire n’est pas seulement celui de poser des mots sur une feuille. Il consiste aussi en l’acceptation progressive de vivre, le temps de la création, à plusieurs. Je me surprends ainsi à me dire, au quotidien, « tiens, ça plairait à C… , ce pull », ou bien « Il faut que je pense à raconter à P… telle ou telle chose », puis à me rendre compte que C et P sont les personnages du roman en cours. Au fil de l’écriture, ils prennent de la densité, de la consistance, et émergent dans la vraie vie. 

Beaucoup d’auteurs se sont amusés à imaginer que leurs créatures prenaient chair (et je ne parle pas seulement du docteur Frankenstein) et menaient une vie propre. Sans me prendre pour Balzac, qui appelait sur son lit de mort le médecin de ses romans, je me demande si tous les écrivains ressentent cela : cette présence de plus en plus concrète de leurs personnages ? Je suis en tous cas persuadée que ces moments de liberté accordés à nos personnes de papier font partie du processus : tandis que nous vivons notre vie, ils tracent leur route, prennent leur autonomie, et quand on se remet devant sa feuille, ce n’est pas nous qui les imaginons, ce sont eux qui nous parlent. 

Ce phénomène résonne aussi dans ma vie privée. Alors que je suis en train de me réinventer une vie professionnelle, après vingt ans d’enseignement, les livres me rappellent qu’on est « cent », qu’on est « mille », et qu’il ne tient qu’à nous de s’ouvrir aux multiples possibilités qu’offre la vie. Je lis donc cette phrase de Pirandello, dans « six personnages en quête d’auteur » : 

 » Le drame est tout entier là- dedans, monsieur, dans la conscience que j’ai, qu’a chacun de nous d’être « un », alors qu’il est « cent », alors qu’il est « mille », qu’il est « autant de fois un » qu’il y a de possibilités en lui »

et je me dis que j’ai bien de la chance finalement. Car qui, sinon un écrivain, peut mieux explorer toutes les facettes qui foisonnent en lui ? 

Alors je laisse vivre mes personnages à leur rythme. Tant pis pour les journées où je n’écris pas un mot, je sais que l’histoire se construit sans moi, dans un coin de mon crâne. Je m’occupe à d’autres tâches, et pendant ce temps de silence sur la page, dans le terreau des mots, ça pousse !

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